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Le château du Champceau et les seigneurs de Chandon

Carte d'État-Major Hameau de Champceau

Carte d'état-major et hameau Le Champceau (CTHS) - Cliquez pour agrandir


[Source : François Ginet-Donati, Bulletin de la Société d'Études du Brionnais, Novembre-décembre 1931.]

Le château de Champceau

Situé à mi-chemin de Marcigny et d'Iguerande, sur le territoire de la commune de Saint-Martin-du-Lac, le château de Champceau donne en plan un rectangle dont les angles étaient flanqués de tours cylindriques de quatre mètres de diamètre ; il n'en existe qu'une seule aujourd'hui, reconstruite au XVIIIe siècle, celle qui regarde le sud.

Ce château était entouré de fossés, il mesure environ 45 mètres de long sur 35 mètres de large ; au milieu du mur de façade tourné au couchant, face à la route, se voyait autrefois un portail, aujourd'hui muré, d'une ouverture de 3 mètres 80 ; on retrouve les pieds-droits à l'intérieur des murs ; il existait devant ce portail un pont-levis, des pierres de taille creusées en forme de coussinets recevaient les tourillons de l'arbre horizontal du pont, qui au moyen de chaines et de poulies venait se dresser. On retrouve ce même système de pont-levis sur la grande porte percée à l'est, mais l'ouverture est plus étroite.

Une partie du château fut reconstruite vers 1780, celle où se voit la tour et qui sert à l'habitation actuelle. Celle qui lui fait suite date du XVe siècle, il subsiste à l'étage supérieur quelques fenêtres à meneaux de petites dimensions, on y arrive par un escalier à vis avec portes à linteaux en accolade.

Le mur de pignon au sud est percé de deux petites meurtrières placées à deux mètres au-dessus du sol, dans le haut se voit une archère aux bras égaux dont les lèvres sont fortement chanfreinées ; ce mur nous paraît plus ancien.

Les murs du nord et du midi qui formaient la cour sont en partie démolis ; sur celui de l'est vinrent s'appuyer quelques constructions, du commencement du XVIIe siècle, on retrouve sur la frise d'une cheminée un petit écu gravé au trait dont le champ porte une roue qui a dû appartenir aux Patural, famille qui possédait le château vers cette époque.

Le Champceau fut pris par les Ligueurs et repris par les Royalistes au moment où Marguerite de Damas était veuve de Jean de Chandon. Jean Gregaine, de Marcigny, dans son « Histoire de la Ligue en Brionnais » nous rapporte que le 4 août 1594 « le capitaine Montillet, natif de Charlieu, ayant charge de cinquante chevaux légers sous M. de Thianges, s'est emparé du fort du Champceau et fit réparer les brèches que l'on y avait faites, refaire les ponts et portes et y établit garnison. » Le 4 octobre « En ce même temps le capitaine La Rivière, lieutenant du sieur Montillet et commandant en son absence au Champceau, envoyait des commissions signées Rongefert par tous les villages circonvoisins, lesquels il avait cotisés en sa volonté et pour le payement desdites cotes, soit en argent bled et fourrages ; il allait prendre les pauvres villageois en leurs maisons et aux labourages et semailles, sans qu'aucun s'y apposât si grande était la licence des gens de guerre. » Plus loin il écrit : le 3 novembre 1594, M. de la Nocle-Beauvoir a fait partir de la ville de Marcigny partie de ses troupes y étant en garnison avec la compagnie de M. de Saint-Sernin qu'il avait mandé et environ deux cents arquebusiers du plat pays et tous allèrent investir le chasteau du Champceau, dans lequel commandait un portugais nommé La Rivière, en l'absence du capitaine Montillet ; il y eut forte escarmouche faisant les approches, et néanmoins, nos gens sous la faveur des mantelets que l'on avait fait faire trouvèrent le moyen d'approcher le fossé, duquel ayant sapé et fendu la chaussée, le rendirent à sec dans vingt-quatre heures et se logèrent au pied de la muraille sans néanmoins pouvoir beaucoup s'exposer, car ce peu qui étaient dans le fort en nombre de vingt au plus étaient soldats assez résolus. Ce qui occasionna le sieur de La Nocle de faire monter sur bois et roues deux grandes pièces de fer, lesquelles sont en cette ville et avec les arquebuses à crocs et fauconneaux qui lui furent délivrés, faire conduire le tout au siège, partir pour abattre les guérites du fort et partir pour intimider les assiégés, lesquels ayant éprouvé la force des fauconneaux et des arquebuses à crocs qui perçaient leurs dites guérites, capitulèrent le dimanche au soir, six dudit mois et sortirent quinze Cuirassiers et dix-sept arquebusiers, vie et armes sauves, et tous furent conduits en sureté jusqu'à Paray qui tenait encore leur parti.

Le lendemain, et par deux jours consécutifs, ledit sieur de La Nocle fit ruiner les fortifications faites par ledit La Rivière au-devant dudit Champceau et démolir le portail, les tours et partie des murailles, quant à la grange elle avait été ruinée auparavant.

Pendant le siège, les troupes susdites furent nourries aux frais des habitants de Marcigny et ce faisait munition et étape de pain, vin et chair par départence sur chaque habitant.

La famille de Chandon

Le château de Champceau fut possédé par la famille de Chandon, près Charlieu. Les seigneuries de la Tour de Chandon en Lyonnais, du Champceau en Bourgogne, Davayé en Mâconnais, les comtés et vicomtés de Buailles (Briailles), les baronnies de Lonques appartenaient aux Chandon.

Le nom de cette famille est fort ancien. L'existence de Sybille de Chandon est constatée en 1295 par deux jugements de maintenue obtenue le premier en 1478, le second en 1667, il a été contradictoirement établi que les membres de cette antique famille avaient pris et avaient pu prendre la qualité de bourgeois de Charlieu et de Mâcon dès l'année 1400, sans déroger à leur qualité de gentilhommes et sans cesser de jouir des privilèges et des avantages attribués à la noblesse.

La filiation suivie de cette famille commence à René de Chandon, mort à Avignon en 1280, des suites de ses blessures reçues à Tunis. Il n'eut qu'une fille, Sybille, dame de Chandon, Fleury-la-Montagne et aultres lieux ; étant veuve sans enfant elle laissa ses biens en 1309 à Guillaume son neveu, fils de N. Chandon, frère de René.

Guillaume Chandon était marié avant la mort de Sybille à Béatrix de Laubespin, dont il eut trois fils : Bernard, Hugues et Guy. Un des petits-fils de Hugues qui épousa Vincelette de Vergy acquit la terre de Champceau.

Noble homme Jehan Chandon, écuyer seigneur du Champceau et de la Palu rendit foi et hommage lige au roi le 12 octobre 1512 pour ses deux dernières seigneuries et en fit le dénombrement le 12 octobre suivant. Jehan Chandon est qualifié damoiseau, seigneur de Briailles et du Champceau, dans un acte de 1522. Il épousa Marguerite de Damas, dont il eut entre autres enfants Pierre Chandon et Philippe, chevalier de Saint-Jean de Jérusalem commandeur de Saint-Antoine. Ses petits-fils, Claude, écuyer ; Jean, chevalier, co-seigneurs de Briailles ; François, chevalier, mort en Hongrie, et Gabriel, capitaine de cavalerie, furent, par arrêt de la Cour des Aides du 2 août 1600, maintenus dans leur noblesse.

Jean de Chandon, susnommé, fut père de Claude Geoffroy qui suit, et de Jean, prieur de Saint-Aignan de Jars-en-Berry. Claude Geoffroy de Chandon, chevalier seigneur de Briailles, baron de Lanques par son alliance avec Gabrielle de Bermand, servait en 1629 au régiment des gardes du roi, compagnie de Saint-Preuil, de 1632 à 1648, comme capitaine, puis major au régiment de Créqui-cavalerie.

Il fut père de : 1° François de Chandon, maréchal des camps et armées du roi ; 2° Henri de Chandon, chevalier, baron de Lanques, qui continua la descendance ; 3° Claude de Chandon, chevalier, comte de Briailles, capitaine au régiment de Frontenay-dragons en 1697, puis colonel et chevalier de Saint-Louis.

Henri de Chandon, susnommé, eut de son alliance avec Élisabeth de Croisier deux fils : Philibert-François de Chandon, baron de Lanques, comte de Briailles, commandant du corps royal de la cavalerie hongroise, au service de la France, mort en 1789, ne laissant qu'une fille, mariée au comte de Percy ; et Claude-Charles de Chandon, chevalier, comte de Briailles, qui n'eut pas d'enfant.

La branche cadette a eu pour auteur Thomas de Chandon, avocat du roi au baillage de Mâcon, frère puiné de Jean de Chandon, seigneur du Champceau de Briailles et de la Palu. Ledit Thomas fut père de Robert Chandon aussi avocat du roi au baillage de Mâcon, marié à Georgette de Chintré et père de Jean dont il va être parlé, de Gratien qui continua la descendance de François, chanoine de Mâcon.

Messire Jean de Chandon, seigneur de la Montagne, Lucy-le-Bois, Charbonnière, Annay-la-Côte, Hurigny, seigneur des terres et châtellenie de Davayé, Chaux, Crèches, Saint-André-le-Désert, Le Bois-Sainte-Marie, Vérizet, etc., fut successivement conseiller au présidial de Lyon, avocat à Paris, maître des requêtes de l'Hôtel le 11 mars 1578, conseiller d'état, président au grand Conseil le 29 août 1585, maître des requêtes honoraires le 3 juin 1587, premier président à la Cour des Aides de Paris en 1592. Le 25 octobre 1595 il donna procuration pour acquérir des terres du roi jusques à concurrence de treize mille écus et rétrocéda la seigneurie et châtellenie de Davayé à son neveu Thomas de Chandon. Le 23 décembre de la même année il acquit la terre d'Hurigny.

Pierre Chandon, un des fils de Gratien, fut pourvu d'un office au Parlement de Bourgogne ; son fils aîné, Nicolas-Claude Chandon, fut avocat et conseiller du roi au baillage de Mâcon. En 1781, Louis XVI accorda des lettres d'élu honoraire en l'élection de Mâcon à Léonard Chandon et à Claude Chandon, conseiller et avocat du roi au baillage de Mâcon, pourvu en 1718 de lettres d'honneur dudit office.

La maison de Chandon compte parmi ses principales alliances les suivantes : Ber, Bermand, Boyer de Chanlecy, Bressieu, des Brosses, Buyat, Chintré, Clermont-Tonnerre, Croizier, Cuzy, Damas, Escrivieux, La Faye, Fraigne, Franchelins, Genouilly, Glettines, du Lac, Laubespin, du Lys, Maigret, Moët, Molins, Moulon, Mordant, La Palu, Parangue, Percy, Rigney, Varennes, Veincy, Vergny, Vichy, Villers, Vouzances.

La branche aînée portait : d'argent à la fasce de gueules accompagnée de 3 trèfles de sable.

La branche cadette, qui depuis l'extinction de l'ainée a repris les armes ci-dessus décrites, portait antérieurement : d'or à la fasce engrêlée de gueules accompagnée de 3 trèfles de sable.

Supports : deux lions.

L'ancienne maison des Chandon à Iguerande

Dans le bas du bourg d'Iguerande, faisant suite à la petite place du monument aux morts, se voit une ancienne maison ; elle fut en partie reconstruite par une famille de notaires, les Dechizelle, vers 1769. Ce logis fut habité au XVe siècle par les Chandon. On y a conservé deux belles cheminées, l'une au rez-de-chaussée de l'aile droite, l'autre à l'étage supérieur, celle-ci mesure 2 m. 80 sur 1 m. 70. La frise, richement ornée de nervures aux profils élégants d'un galbe et d'une souplesse rares, est portée par des pieds-droits formés de colonnettes avec bases polygonales reposant sur des socles très élevés.

Au milieu de la hotte se voit, sculpté, un écu, il est entouré d'un rectangle dont les bords forment une petite baguette ronde, faisant accolade à la partie supérieure. Ce sont les armes de Chandon, on y retrouve la fasce et les 3 trèfles qui sont posés 2 et 1 sur le champ de l'écu. La cheminée du rez-de-chaussée, de mêmes proportions que la précédente, porte sur sa frise un petit écu qui fut brisé, peut-être les armes de l'une des dames de Chandon, qui auraient pu nous fixer sur la date de la construction de ce corps de logis.

À 20 mètres au nord de ce bâtiment se voit une tour isolée qui constituait le colombier à pied, prérogative du seigneur haut-justicier. Le mur du nord sur lequel est venu s'implanter un hangar est percé d'une grande porte ogivale dont les nervures portent des bases pour arriver d'un seul jet à la clef, ce qui indique un travail du XVe siècle. La souplesse et la qualité de ses nervures en font un ouvrage assez rare pour la région, on pourrait les attribuer aux sculpteurs qui travaillèrent à Charlieu dans nombre d'habitations civiles ou religieuses de cette époque. On sait que les Chandon étaient aussi bourgeois de Charlieu.

info Généalogie des familles Chandon et Chandon de Briailles

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