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Le château de Chauffailles

Château de Chauffailles


Situation : au Sud-Sud-Ouest du bourg, à proximité du ruisseau du Botoret ; 0.650 km environ de la place de l'église
Époque : période classique (logis) ; tours de la fin du Moyen Âge
Affectation actuelle : Espace sportif
État : très bon
Protection : allée de platanes : Site inscrit (17 avril 1942)


Histoire

L'histoire de la terre ou seigneurie de Chauffailles est en partie liée à celle de Châteauneuf, ancienne châtellenie royale qui, à l'instar de celle de Bois-Sainte-Marie, succédait à une châtellenie comtale possédée, elle, par la famille des Le Blanc, vicomtes de Mâcon (voir au premier tome du canton de Chauffailles, Commune de Châteauneuf : château).

Chauffailles (Choffailles, Choffaillies) eut également ses propres seigneurs. L'analyse faite par L. Lex du Papirus feodatariorum dans sa recension des Fiefs du Mâconnais, révèle que « le 9, alias le 11 août 1368 », Guillaume de Mazille, « en son nom et au nom de Marguerite, sa femme, fille de Durand Bufferard, de Château-Neuf, avoue tenir en fief et hommage », entre autres biens, seize bichets de seigle et 4 bichets d'avoine de rente annuelle sur la dîme de Choffailles (Chauffailles)... la moitié des menus blés d'une certaine partie de ladite dîme..., la moitié de la paille de ladite partie de dîme, ... à charge par ledit Guillaume de fournir au temps des moissons un domestique et un cheval pour lever ladite dime ... ; une grange sur la paroisse de Chauffailles où est emmagasinée la dîme..., un cellier où l'on dépose le blé de ladite dîme, lesdits grange et cellier valant 8 livres tournois ».

À peu près à la même époque, apparaissent les seigneurs de Villon, connus en fait dès le XIe siècle, et dont l'ancien fief était au hameau de ce nom, près du ruisseau du Botoret, où Jean de Villon, capitaine-châtelain de Châteauneuf, avait fait bâtir un moulin en 1362. Un Jean de Villon avait déjà prêté en 1265 hommage au duc de Bourgogne Hugues IV pour sa terre de Villon et pour ses biens d'Amanzé, qu'il tenait de sa mère Alix d'Amanzé.

Jean d'Amanzé II, fils de Guillaume et de Marguerite de Busseul, reçut en 1415 Chauffailles, Prizy, Champagny, du chef d'Antoinette de Villon, son épouse. « Issue d'une bonne et noble famille de ce temps-là », celle-ci était la fille et unique héritière de Jacquet de Villon, chevalier, seigneur dudit lieu, et de la fille de Guillaume de Malleyo, chevalier. « La terre de Chauffailles demeura dans la descendance des époux Amanzé-Villon » et dans la branche cadette, dite « d'Amanzé-Chauffailles ».

Par dévolution directe, elle fut transmise à Guillaume, époux de Marguerite de Semur, puis à Jacques, dit Jacquelin, sixième fils des précédents, marié en premières noces à Etiennette de Chartemerle, d'où procéda Jean, seigneur d'Amanzé ; puis, en secondes noces, à Philippe Damas qui lui donna un fils prénommé François, devenu seigneur de Chauffailles peu avant 1490, après un partage réalisé avec son demi-frère. François, tige des seigneurs d'Amanzé-Chauffailles, épousa en premières noces Catherine de Semur, de la même maison que Marguerite son aïeule, mais d'une autre branche ; en secondes noces, Gilberte de Busseul. De la seconde union procédèrent François, époux de Françoise de Tavanes (ainsi dénommée dans un acte conservé sous la cote B 1325 aux Archives de Saône-et-Loire, tandis que, dans sa Généalogie de la Maison d'Amanzé, d'Hozier inscrit le nom de Françoise de Traves), et, à la génération suivante, Guillaume, époux (1578) de Françoise de La Guiche-Sivignon, fille de Georges, chevalier, seigneur de Sivignon, Saint-Aubin et Nanton (Archives de Saône-et-Loire, ibidem, contrat de mariage). Parmi les enfants des époux d'Amanzé-La Guiche, Claude, dit "mineur" en 1597, devint baron de Chauffailles, seigneur de Vis, Arcinges, Ecoches, Saint-Germain-la-Montagne et Belmont, Élu de la noblesse à Mâcon en 1614, et fondateur, le 6 août 1634, de l'ermitage de Notre-Dame de Montchéry près de Chauffailles, pour la desserte duquel serait affecté, ainsi qu'on l'a dit, un ermite prêtre dont la pension annuelle serait fournie par les revenus du domaine du Montet. Par testament du 12 mai 1635, reçu Pierre Duperron, notaire royal, Claude d'Amanzé institua pour héritier universel François d'Amanzé, son neveu, fils d'Antoine et de Françoise de Damas, dame d'Estieugues : lequel François (qui, plus tard, serait tué au siège de Saint-Omer) disposa de l'hoirie qui lui était ainsi échue, par acte du 17 juin 1637, en faveur de son père (ibidem, B 1350 ; 1363). Ce dernier devait plus tard céder et transporter la baronnie de Chauffailles à Jacques, son autre fils, par acte du 27 mai 1663 (ibidem. B 1363, fol 121 v°) ; les époux Antoine d'Amanzé-Françoise de Damas n'eurent pas moins de douze enfants mentionnés dans l'Armorial de La Chenaye-Desbois !

Jacques d'Amanzé, « seigneur baron de Choffailles, Vis, Arcinge, Escoches, Belmont et Saint-Germain-la-Montagne, demeurant en sa terre de Choffailles », testa le 6 septembre 1679 (ibidem. B 1370, fol. 39 v°), « étant dans sa chambre qui prend jour sur les fossés du costé de soir ». Il élisait sépulture en l'église de « Choffailles tombeau de ses prédécesseurs, seigneurs barons de lad. terre », et instituait Marie-Anne Rolin, son épouse, héritière universelle, « pour remettre toutesfois lad. hoirie à Antoine d'Amanzé son fils aisné au temps de sa majorité ». Lors de la reprise de fief et du dénombrement passés le 24 mars 1676 par Jacques d'Amanzé, le procureur général, dans ses conclusions, déclarait toutefois ne pas « approuver la qualité de baronnie donnée audit Chauffailles » (L. Lex. Les Fiefs du Mâconnais). Son épouse Marie-Anne Rolin, devenue veuve, reprit elle-même de fief le 2 juin 1681 et donna le dénombrement de la terre et seigneurie de Chauffailles en qualité de mère et tutrice d'Antoine d'Amanzé, leur fils aîné.

La dernière héritière des seigneurs de Chauffailles, à la veille de la Révolution, fut Marie-Cécile d'Amanzé, fille d'Antoine (1) et de Cécile de Falconis. Elle avait épousé en 1741 Claude-Marie de Saint-Georges, à qui elle porta Chauffailles, en vertu d'un partage successoral de 1744 réalisé entre elle et Antoine d'Amanzé, son frère, qui reçut la seigneurie d'Auvillers (commune de Neuilly-sous-Clermont, dans l'Oise) : acte reçu Me Brochant, notaire à Paris, le 23 janvier 1744 (L. Lex, op. cit.).

En 1794, « le château de Chauffailles avait encore quatre tours aux angles, mais n'était pas de défense, selon les Visiteurs nationaux ; ses restes ont servi de nos jours à une blanchisserie de toile » (sic) (Mgr Rameau, Les anciens fiefs du Mâconnais, ms.).

Marie-Cécile Damanzé décéda, veuve, à Chauffailles le 22 nivôse an 10, âgée de 82 ans ; les témoins de l'acte d'état civil furent Joseph Odin, cultivateur, domestique ; Joseph Lafond, voisin, Vincent Durix étant Maire.

Lors du déblaiement de l'ancien cimetière, vers 1839, furent exhumées quatorze tombes en grès ; il s'agissait vraisemblablement des sépultures des comtes de Saint-Georges (Annuaire de Saône-et-Loire, 1839).

(l) Antoine d'Amanzé, chevalier, seigneur de Chauffailles, était présent aux fiançailles de Claude de Saint-Georges, chevalier lui-même, seigneur de Saint-André en Roannais ; celui-ci était le fils d'Antoine de Saint-Georges, marquis de Saint-André, et de défunte Charlotte-Elisabeth d'Apchon. La fiancée était Françoise-Eléonore de Montchanin, fille d'Antoine, seigneur de La Garde-Marzac et de Chassigny-sous-Dun, et d'Eléonore de Fay La Tour-Maubourg ; les fiançailles furent célébrées en 1729 au château de La Garde, à Saint-Igny-de-Vers, en présence, également, de Claude-Marie de Saint-Georges, chanoine-prévôt et comte de Lyon. Claude de Saint-Georges, marquis de Saint-André-d'Apchon (Loire, canton de Saint-Haon-le-Châtel), reprit de fief pour la seigneurie de Chassigny-sous-Dun les 4 mai 1735 et 6 juin 1738.

En 1829, le tènement B 10 à 17, englobant le château proprement dit, ses fossés et ses abords, était, selon le relevé cadastral de la commune de Chauffailles et les matrices correspondantes, la propriété de Pierre-Marie Deville ; maire de Chauffailles, il décéda le 30 juin 1831, âgé de 79 ans. Pierre Goyne, domicilié à Saint Germain-la-Montagne, devint, à son tour, propriétaire de la demeure des anciens seigneurs d'Amanzé entre 1837 et 1866. De son mariage avec Marguerite Aulas, il eut un fils prénommé Auguste, né le 13 octobre 1816 à Saint-Germain-la-Montagne, lequel reçut l'héritage paternel ; maire de Chauffailles du 12 octobre 1861 à septembre 1870, puis de mai 1871 à mars 1873, Auguste Goyne est en 1878 qualifié de « second propriétaire foncier de la commune de Chauffailles » époux de Julia Lacroix, fille du député de Saône-et-Loire, qui devait mourir avant lui, il fut Conseiller général du canton de Chauffailles de1848 à 1852 et de 1861 à 1873 ; il décéda le 1er juin 1882 au château de Chauffailles, à l'âge de 66 ans et qualifié de « rentier ». Casimir-Joseph Dumoulin, né à Saint-Germain-la-Montagne (Loire) le 26 février 1856, et décédé à Chauffailles le 7 janvier 1914, acquittait les taxes foncières afférentes à la propriété en 1883-1884 ; d'abord industriel à Paris, c'est lui qui, en 1884, fondait à Chauffailles, une usine pour le tissage mécanique de la soierie, qui fit travailler « deux cents ouvriers des deux sexes » (Dictionnaire biographique de Saône-et-Loire) ; il avait épousé Marie-Antoinette Reynier, mariage duquel fut issu Elisabeth, née à Paris, dans le XVIe arrondissement, le 8 août 1882, et décédée célibataire à l'Hôpital de Chauffailles le 15 novembre 1941, après avoir testé le 3 octobre de la même année en faveur de cet établissement hospitalier. Elle lui léguait « son château de Chauffailles, soit tous les bâtiments, cour et verger intérieurs, jardin potager, de l'avenue au Botoret, avec, au Sud-Est des bâtiments, une contenance en allées et pré de deux mille mètres carrés à prendre suivant une ligne droite allant de l'étang non compris au Botoret, tout en réservant les passages nécessaires au surplus du pré de ce côté, et avec liberté pour l'hôpital de prendre les eaux utiles dans l'étang avec tous immeubles par destination (meubles, matériel et produits de culture non compris) et avec les droits sur les francs-bords de l'avenue ». Ladite libéralité était assortie des « conditions et charges suivantes : a) interdiction de vendre la propriété à des personnes nommément désignées dans le testament (1), ou, au moins, interdiction de vendre avant l'extinction des rentes viagères de trois mille six cents francs et quatre rentes viagères de mille huit cent francs à des personnes nommément désignées. Le désir de la testatrice était, en outre, que le château puisse être utilisé pour la création soit, d'une maison de repos, de convalescence ou de vacances, soit d'un hôpital, d'une maternité ou d'un asile, la testatrice n'imposant d'une façon absolue aucune affectation spéciale » (Considérations préliminaires à l'arrêté du Préfet en date du 17 juillet 1944).

La libéralité de Melle Dumoulin fut acceptée par la Commission administrative de l'Hôpital de Chauffailles le 14 février 1944, malgré les clauses et conditions énumérées ci-dessus, et peut-être un peu « sous l'influence de la population qui désirerait que le domaine légué ne passât point en mains étrangères » (déclaration rappelée dans une correspondance du Préfet au Sous-préfet, le 17 novembre 1942) ; deux des héritiers avaient d'ailleurs fait abandon pur et simple de leur part de rente viagère ; un avis favorable fut d'autre part donné par le Conseil municipal de Chauffailles le 20 février 1944, puis par la Direction régionale de la Santé le 5 juillet 1944, bien que celle-ci eût averti que les immeubles légués ne pourraient en aucune façon convenir à « l'établissement d'un hôpital, d'une maternité ou d'un asile » ; le Directeur départemental de l'Education Générale et des Sports fit enfin valoir qu'il serait possible d'envisager l'aménagement d'un terrain de sports après acquisition du surplus du parc et des étangs. En conséquence, la Commission Administrative de l'Hôpital de Chauffailles fut autorisée, par arrêté préfectoral du 17 juillet 1944, à « accepter, aux clauses et conditions stipulées, le legs consenti à cet établissement par Melle Dumoulin Elisabeth, suivant son testament du 3 octobre 1941 : legs consistant en une propriété sise à Chauffailles, telle qu'elle est décrite au procès-verbal dressé le 14 février 1944 par M. Grizard, expert, qui en a chiffré la valeur estimative à 200.000 francs ».

Selon M. Louis Grizard, expert désigné, les immeubles en question, au lieu-dit « Le Château », se composaient « d'un corps de bâtiment d'habitation principal dit le Château, comprenant un rez-de-chaussée de six pièces, un premier étage de douze pièces avec cave et grenier attenant au château - il existe un bâtiment à usage d'exploitation avec remises, écurie, buanderie, hangar, fruiterie, habitation du gardien, avec jardin potager, jardin d'agrément, cour et petite parcelle de pré » -, d'une contenance totale de 8015 m2 environ, « confinés au Nord inclinant à l'Ouest par chemin public de Chauffailles à Laval ; au Nord inclinant à l'Est et au Sud inclinant à l'Est, par le surplus de la propriété aux héritiers de Mademoiselle Dumoulin, et au Sud inclinant à l'Ouest, par la rivière le Botoret ».

À la date de l'arrêté préfectoral, la propriété faisait l'objet d'une « réquisition l'affectant au logement de militaires de la gendarmerie, logement pour lequel une location annuelle de 20.000 francs (était) envisagée » ...

Le château de Chauffailles n'a conservé que deux de ses anciennes tours signalées, en 1794, par les Visiteurs nationaux. De section cylindrique, mais de diamètre inégal, coiffées d'une poivrière, elles accostent la façade Sud-orientale d'un corps de logis d'architecture classique, haut d'un étage ; des lucarnes au fronton légèrement courbe, chargé d'une boule - cinq lucarnes sur la façade Sud-Est - pointent à la base de la toiture aiguë couverte d'ardoises. La tour érigée à l'Est, beaucoup plus volumineuse que celle qui occupe l'angle opposé, est creusée de baies, inégales, à encadrement XVIe siècle et, à la base, de trois ouvertures ovales qui ne semblent pas être des canonnières proprement dites ; l'une d'entre elles surmontant une archère cruciforme. La tour méridionale est pourvue d'une élégante lucarne à fronton triangulaire, haut placée, mi-partie dans la partie supérieure de la maçonnerie, et mi-partie, saillant du cône de la poivrière.

Le logis principal est accompagné de bâtiments bas et allongés, disposés en équerre ; partie de cette aile montre des percements à linteau cintré sur deux niveaux ; son prolongement moderne est peu ajouré ; un même couvert à faible pente et à deux rampants protège le bâtiment.

Le site constitué par l'allée de platanes conduisant au château a été inscrit à l'Inventaire des Monuments Historiques le 17 avril 1942.

Documentation :

- Archives de Saône-et-Loire. Série B 1095, 1283, 1325, 1350, 1355, 1363, 1370.
- L. Lex, Les Fiefs du Mâconnais, Mâcon, Protat frères, Imp. 1897.
- Annuaire de Saône-et-Loire, 1856.
- Jean Roussot. Essai sur l'origine de quelques châtellenies royales du bailliage de Mâcon, dans : Annales de l'Académie de Mâcon, tome XXXVIII, 1946-1947, pp. 116-126.
- De La Chenaye-Desbois et Badier, Dictionnaire de la noblesse française, Paris, Schlesinger, 1863-1876, 20 vol.
- D'Hozier, La généalogie et les alliances de la maison d'Amanzé, Preuves et additions par Palliot. À Dijon chez ledit Palliot, 1659.

Source : Fiche Monument établie par Mme A.M. Oursel (1970-1991), AD71, Inventaire de Chauffailles, Château, p. 1-10/19.

Compléments :

- Inventaire du château de Chauffailles après le décès de Jacques d'Amanzé mari de Marie-Anne Rollin (1679).
- Inventaire du château après le décès de Marie-Cécile d'Amanzé veuve de Claude-Marie de Saint-Georges (28 prairial-4 messidor an X - 1802).

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