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L'ancienne maison forte des Sertines à Briant



Localisation :

Commune : Briant
Situation : Les Sertines
Monument : Ancienne maison forte
Situation exacte : Les Sertines ; à l'Ouest de la D 34, avant son carrefour avec la D 20.
Date de construction et principaux remaniements : fin du Moyen Age : donjon ; époque Renaissance : logis
État de conservation : en ruine complète
Protection : M. H. (Inv. Suppl. ou Cl.)

Historique :

Les Sertines furent le fief d'une famille chevaleresque de ce nom, dès le XIe siècle ; Jocerand de Sartinis donne, en 1090, à la prieure du couvent de Marcigny, l'église que lui ou ses aïeux avaient fait construire à St-Christophe-en-Brionnais, avec la dîme ; en 1110, Hugues et Geoffroy d'Essertines donnent au même prieuré la dîme de Briant, écrit E. Révérend du Mesnil.

Le 10 août 1521, Marguerite de Cos, veuve de Pierre d'Essertines, et Guy, son fils, reconnaissent tenir en fief-lige, du seigneur de Beaujeu « à cause de son château et châtellenie de Semur-en-Brionnais » la terre que Pierre d'Essertines avait acquise d'Hugues de Chavannes, damoiseau.

Jean d'Essertines est seigneur du lieu en 1350 ; de ses deux filles, l'une épousa Jean II de Lespinasse, chevalier, seigneur de Montserrin et de Sivignon, et lui apporta en dot la terre d'Essertines.

Dans un titre du 4 février 1429, Etienne de Givingié et Marguerite de Lespinasse sont seigneur et dame d'Essertines, en partie ; Jean de Gevingy (la véritable orthographe du nom) légua Essertines à sa femme qui le conserva à sa famille.

En 1530, Joachim de Montregnard se qualifie seigneur d'Essertines, puis, en 1540, vend le domaine à Pierre de Chaugy, seigneur de Chenay-le-Châtel. Peu après la terre passe à Jean Quinquier, prévôt de l'église de Mâcon : « ce fut sous lui que le château d'Essertines fut ruiné, en février 1576, par les Reîtres, commandés par Casimir et le prince de Condé, venu de Marcigny a la tête de 25.000 hommes. » (Révérend du Mesnil) ; ce même jour furent brûlés le presbytère de Briant et la belle flèche de l'église paroissiale.

Privée désormais de sa forteresse, la seigneurie d'Essertines perdit de son importance ; elle passa, par acquisition sans doute, à la famille Molière, vraisemblablement originaire d'Oyé où un notaire de ce nom est connu vers 1537.

C'est François Molière qui « fit bâtir la maison actuelle que défendit une haute tour carrée. La date de 1583, placée au-dessus de la porte extérieure de l'appartement servant maintenant de cave, précise le temps de cette construction... » (Révérend du Mesnil).

La famille Molière, puis de Molière, marqua le XVIIe siècle. François II de Molière, dit le "Tragique", époux d'Anne Picardet, fut l'auteur de tragédies (La semaine amoureuse, la Polyxène, etc) que fit éditer son fils, François-Hugues, lui-même auteur et comédien, et qui connurent, à Paris, un renom certain. Louis de Molière, fils de François-Hugues, fut également célèbre comme danseur, musicien et versificateur (4 en 1688). Jean-Baptiste Pocquelin, dit Molière, fut-il en relation avec cette famille ? Tout porte à le croire, mais la preuve n'en a pas encore été établie.

Essertines fut ensuite au seigneur de Chevigny ; Ponthus Mathieu, dont l'épouse, Anne de Molière, élit sa sépulture en l'église de Briant, au tombeau de ses prédécesseurs ; puis, par alliance encore, aux Champier, mais Georges-Melchior Champier, époux de Louise de Mathieu, ne garda pas longtemps la seigneurie ; en 1729, il la revendait à Antoine Le Prestre, comte de Vauban, neveu à la mode de Bretagne du maréchal célèbre ; décédé le 22 mai 1760, il laissait Essertines à sa veuve, mère de trois enfants ; émigrés à la Révolution, leurs biens furent saisis et mis en adjudication le 2 brumaire an IV. Pierre Ravier, de Briant, avec plusieurs autres co-acquéreurs, en devint le principal propriétaire (vente ratifiée le 2 prairial an X par Antoine Le Prestre, revenu d'émigration).

Du château rebâti en 1583, E. Révérend du Mesnil donne la description suivante : « il comprit, outre les communs, un bâtiment presque carré à trois étages, sans architecture extérieure, surmonté d'un toit fort aigu porté par une riche charpente en berceau assez remarquable ; il resta flanqué d'une haute tour carrée du côté du Nord, débris probable du vieux donjon des premiers seigneurs, véritable burg gallo-romain au temps de la décadence de l'empire romain. Ravier (l'acquéreur de bien national) crut bon, pour en faire disparaître la féodalité de le niveler en une pente faisant suite à la toiture de la maison ; cette mutilation inintelligente a du coup enlevé presque tout cachet au château moderne d'Essertines qui ne se distingue plus que par sa hauteur des autres maisons du hameau. Il fit malheureusement plus : il flamba tous les livres de la bibliothèque, tous les manuscrits, tous les papiers... Il fit soigneusement gratter les meubles d'un magnifique écusson en pierre se trouvant sur la hotte de la cheminée de la tour carrée au second étage. »

« Il reste bien peu de chose du vieux château-fort : un pan de mur et un fragment de tour de l'enceinte, qui paraît avoir eu quatre tours, une à chaque angle ; on a encastré ce débris dans le mur d'un bâtiment neuf d'exploitation...»

De ces vestiges décrits par l'auteur de la fin du XIXe siècle, il ne demeure plus, aujourd'hui, qu'un fragment de muraille, à proximité et au Nord du château, lui-même complètement abandonné, seul au milieu d'un grand pré d'embouche.

Armes des Molière : « d'argent au cœur de gueules traversé d'une flèche de même ».

Une chapelle existait aux Sertines, d'après un rapport de visite présenté à Mgr l'évêque d'Autun par l'abbé Thouvent, archiprêtre de Semur et curé de Digoin, au milieu du XVIIe siècle : chapelle « sans ornement ni culte depuis au moins une vingtaine d'années, c'est-à-dire vers 1650 ; on n'y connaissait aucune fondation. » (Serge du Cray)

Description :

Ancienne maison forte, malheureusement en ruine et dans un état irréparable, constituée de deux bâtiments en équerre, appareillés de grès et granit, dont l'un, plus ancien, est un donjon carré aux murailles épaisses, principalement au Sud (deux mètres environ), à ciel ouvert, laissant voir une petite baie en plein cintre à la partie supérieure du mur oriental de la tour arasée pour supporter une toiture en appentis qui n'existe plus aujourd'hui et, à l'extérieur, à la jonction du donjon qui s'y accole, les restes d'une petite bretêche.

Au Nord-Est du donjon, et en saillie fut édifié un logis Renaissance, haut de deux étages, couvert d'une toiture à quatre pans ; l'entrée principale, à l'angle droit de la façade septentrionale s'opérait par une porte toscane (dont il ne subsiste que quelques vestiges), et les étages étaient desservis par un bel escalier Renaissance, aujourd'hui à ciel ouvert.

Au rez-de-chaussée de ce logis se voit encore une grande pièce couverte d'un plafond à la française, avec cheminée de pierre à grande hotte et piédroits moulurés (XVIe siècle).

Au Nord du logis subsistent les vestiges, d'un mur d'enceinte percé d'une archère.

Dans l'ancienne cour intérieure, près de l'entrée du logis principal, joli puits à margelle circulaire, dont le fût très court est creusé d'une gorge.

Toutes les pierres taillées ou sculptées les plus intéressantes qui pouvaient faire partie de cet ensemble monumental ont été enlevées ou ont disparues.

Bibliographie :

- REVEREND du MESNIL (E.), François de Molière, seigneur d'Essertines, Anne Picardet sa femme et leur famille
- CRAY (Serge du), Briant (ronéotype)

Source : Fiche de repérage établie le 8 février 1972 par Mme Oursel chargée de mission (AD71)

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